L’Annonciation. 10 chefs-d’œuvre

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Patrick AULNAS

L’Annonciation, thème très souvent traité en peinture, est un épisode décrit dans l’Évangile selon saint Luc. En voici d’abord un petit résumé avant la reproduction du texte de la Bible.

L’archange Gabriel vient à Nazareth pour rencontrer Marie, une femme vierge fiancée à Joseph, homme de la maison de David. L’archange annonce à Marie qu’elle concevra un fils qu’elle appellera Jésus. Cet enfant, le fils de Dieu, sera conçu par l’Esprit-Saint venu visiter Marie. Marie répond à l’Archange : « Voici la servante du Seigneur : qu’il me soit fait selon votre parole ! »

La conception virginale du Christ (par l’Esprit-Saint et non par Joseph) est qualifiée de « mystère » dans la tradition chrétienne. Il s’agit évidemment d’une simple habileté rhétorique permettant d’éluder pour le fils de Dieu la dimension biologique de la procréation humaine (union d’un mâle et d’une femelle comme pour tous les mammifères). Dans l’iconographie, Joseph apparaît toujours comme un vieillard alors que Marie est une jeune femme. Les susceptibilités masculines sont donc sauves.  Il ne faut pas oublier que toutes ces légendes ont été élaborées par des hommes et non par des femmes.

Les hommes des siècles passés, du moins jusqu’au 17e siècle, croyaient tous fermement que ces belles légendes reflétaient une réalité dans une époque lointaine. La foi des artistes et celle de leurs commanditaires expliquent la munificence des œuvres d’art imprégnées de spiritualité. Pour cette raison, l’épisode de l’Annonciation a conduit vers des chefs-d’œuvre. Il comporte d’ailleurs des éléments visuels remarquables : apparition d’un ange ailé, émotion de la Vierge, mouvement.

Seul l’Évangile selon Luc (1, 26-38) contient le récit de l’Annonciation. En voici le texte.

 

26 Au sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth,

27 vers une vierge qui était fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph ; et le nom de la vierge était Marie.

28 Etant entré où elle était, il lui dit : « Salut, pleine de grâce ! Le Seigneur est avec vous. »

29 Mais à cette parole elle fut fort troublée, et elle se demandait ce que pouvait être cette salutation.

30 L’ange lui dit : « Ne craignez point, Marie, car vous avez trouvé grâce devant Dieu.

31 Voici que vous concevrez, et vous enfanterez un fils, et vous lui donnerez le nom de Jésus.

32 Il sera grand et sera appelé fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ;

33 il régnera éternellement sur la maison de Jacob, et son règne n’aura point de fin. »

34 Marie dit à l’ange : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? »

35 L’ange lui répondit : « L’Esprit-Saint viendra sur vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre. C’est pourquoi l’être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu.

36 Et voici qu’Elisabeth, votre parente, a conçu, elle aussi, un fils dans sa vieillesse, et ce mois-ci est le sixième pour elle que l’on appelait stérile,

37 car rien ne sera impossible pour Dieu. »

38 Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur : qu’il me soit fait selon votre parole ! » Et l’ange la quitta.

 

 

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Duccio. Annonciation (1308-11)

Duccio di Buoninsegna
Annonciation (1308-11)
Tempera sur bois, 44 × 46 cm, National Gallery, Londres.

 

Ce petit panneau faisait partie de la monumentale Maestà de la cathédrale de Sienne, comportant probablement à l’origine plus de 70 scènes religieuses. Elle a été approximativement reconstituée par le Museo dell'Opera del Duomo de Sienne. Ce panneau est le premier d'une série de scènes de l'enfance du Christ sur la façade de la prédelle (partie inférieure) de la Maestà.
La Vierge tient ici une Bible ouverte sur des paroles du prophète Isaïe qui font écho à celles de Gabriel : « Voici qu’une Vierge concevra et enfantera un fils... ». Avant toute approche géométrique de la perspective, qui n’apparaîtra qu’au 15e siècle, Duccio s’est attaché à simuler un effet de profondeur en plaçant les figures dans un ensemble architectural. L’hiératisme de la peinture byzantine a lui-même disparu, les visages et les gestes traduisant les émotions.

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Lorenzo Monaco. Triptyque de l'Annonciation, scène centrale (1410-15)

Lorenzo Monaco
Triptyque de l'Annonciation, scène centrale (1410-15)
Tempera sur bois, 206 × 231,5 cm pour le triptyque entier, Galerie de l’Académie, Florence. 

 

L’humanisation complète des personnages saints, qui sera un axe majeur de la Renaissance est encore lointaine au début du 15e siècle. Mais la peinture est emprunte d’une élégance très maniériste, caractéristique du gothique international. Les plus grands artistes parviennent dans cette voie à des chefs-d’œuvre. La luminosité éclatante et l’élégance du trait nous apparaissent immédiatement sur ce panneau. La première provient du fond or et des couleurs vives et complémentaires (rose et bleu). La seconde résulte du dessin apparent et du génie de l’artiste pour traduire la légèreté et la délicatesse.

 

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Fra Angelico. Fresques de San Marco. L'Annonciation (1442-43)

Fran Angelico
Fresques de San Marco. L'Annonciation (1442-43)
Fresque, 230 × 321 cm, Couvent San Marco, Florence.

 

Les fresques du couvent San Marco de Florence figurent parmi les plus belles jamais peintes, probablement parce que Fra Angelico a su transmettre à ce moment de sa vie la quintessence même de son être. Ces scènes bien connues de la tradition chrétienne baignent dans une ambiance d’humilité, de paix, de douceur, d’extrême délicatesse, et constituent, même pour les non-croyants, une formidable leçon d'humanité.

 

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Antonello de Messine. Vierge de l’Annonciation (v. 1476)

Antonello de Messine
Vierge de l’Annonciation (v. 1476)
Huile sur bois, 45 × 34,5 cm, Galleria Regionale della Sicilia, Palerme.

 

Antonello traite le thème de l’Annonciation d’une manière très personnelle. L’archange apparaît aux côtés de la Vierge sur presque toutes les représentations de la scène. Ici, l’artiste a voulu étudier la réaction de surprise de Marie, occupée à lire et qui se rend compte de la présence de l’archange, qui n’apparaît pas sur le panneau.
Le choix atypique d’Antonello ne se limite pas là. La Vierge, très simplement vêtue, n’a qu’un geste d’étonnement avec la main, son visage restant parfaitement serein. Le regard n’est pas tourné vers le spectateur mais intériorisé, pour signifier une apparition. La palette réduite et l’arrière-plan sombre contribuent également à placer ce petit tableau au niveau des chefs-d’œuvre de l’époque.

 

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Vittore Carpaccio. L’Annonciation (1504)

Vittore Carpaccio
L’Annonciation (1504)
Huile et tempera sur toile, 130 × 140 cm, Galleria Franchetti, Ca 'd'Oro, Venise.

 

Entre 1504 et 1508, Carpaccio peint six toiles pour la Scuola di Santa Maria degli Albanesi sur le thème des Histoires de la vie de la Vierge. L’une d’elle est consacrée à l’Annonciation. Le peintre ne renouvelle pas ce thème abondamment traité aux 15e et 16e siècles, mais réalise une composition à l’architecture brillamment travaillée, associée à un paysage donnant de la profondeur et de la clarté au tableau. Les couleurs délicates et la douce luminosité de l’ensemble en font l’une des toiles les plus réussies des Histoires de la Vierge.

 

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Vasari. Annonciation (1564-67)

Giorgio Vasari
Annonciation (1564-67)
Huile sur bois, 216 × 166 cm, musée du Louvre, Paris.

 

Il s’agit du panneau central d’un triptyque peint vers 1564-1567 pour le maître-autel de l'église dominicaine de Santa Maria Novella d’Arezzo. Les volets latéraux avec saint Donat, évêque d’Arezzo, et saint Dominique, patron de l'église, sont conservés à Florence (Cassa di Risparmio). Le courant maniériste se traduit ici par la gestuelle affectée et l’élongation des doigts.
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Le Greco. L'Annonciation (1597-1600)

Le Greco
L'Annonciation (1597-1600)
Huile sur toile, 315 × 174 cm, musée du Prado, Madrid.

 

Cet artiste hors du commun peut également être rattaché au maniérisme comme on peut le constater avec la gestuelle de Gabriel et de Marie. Mais Greco traite le sujet d’une façon très expressionniste, qui contraste fortement avec les équivalents italiens de la même époque (par exemple le tableau de Vasari ci-dessus). Pour élargir la composition, il introduit la dichotomie ciel-terre, courante au 15e siècle, mais nettement archaïsante à la fin du 16e.
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Philippe de Champaigne. L’annonciation (v. 1644)

Philippe de Champaigne
L’Annonciation (v. 1644)
Huile sur toile, 69 × 71 cm, Metropolitan Museum of Art, New York.

 

 « Les peintures de Philippe de Champaigne ont été décrites comme combinant "un perfectionnisme scrupuleux, frôlant la froideur, avec une vie intérieure d’une intensité profonde". Peintre majeur du classicisme français, son travail a été influencé par le jansénisme, mouvement rigoriste de la Contre-Réforme, qui a finalement été interdit par Louis XIV. Cette composition fait partie des nombreux tableaux de l’époque exécutés à Paris pour la petite chapelle privée de la reine Anne d’Autriche (1601-1666), la veuve de Louis XIII. » (Commentaire MET)
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Eustache Le Sueur. L’Annonciation (1652)

Eustache Le Sueur
L’Annonciation (1652)
Huile sur toile, 297 × 323 cm, musée du Louvre, Paris.

 

Le Sueur cherche à renouveler le thème de l’Annonciation. La surprise de la Vierge, causée par l’apparition de l’archange, n’apparaît pas ici alors qu’elle était un élément assez constant que respecte même Philippe de Champaigne, contemporain de Le Sueur (ci-dessus). La Vierge, en prière devant un pupitre, reçoit l’annonce sans quitter des yeux son livre de prières, comme s’il s’agissait, non d’une apparition, mais d’une révélation purement intérieure. Le titre du tableau prend en considération cet élément.
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James Tissot. L'annonciation (1886-94)

James Tissot
L'Annonciation (1886-94)
Gouache sur vélin, 17 × 22 cm, Brooklyn Museum, New York.

 

Le thème de l’Annonciation devient rare à partir du 18e siècle. Il peut être traité par des artistes en raison de leur découverte de la foi, comme ce fut le cas de Jacques-Joseph Tissot, dit James Tissot (1836-1902), qui connut le succès en Angleterre. En 1888, Tissot a une révélation religieuse dans l’église Saint-Sulpice à Paris. Il consacrera les quatorze dernières années de sa vie à la représentation de scènes bibliques.
Il voyage au Moyen-Orient pour se rendre compte sur place de la nature, des villes et de leurs habitants. Il réalise ensuite plusieurs centaines de gouaches consacrées à des scènes de l’Ancien Testament et de la vie du Christ, dont certaines diffusées en gravures.
L’objectif de l’artiste consistait à se rapprocher de la vérité biblique.

 

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Commentaires

  • Tom Watson
    • 1. Tom Watson Le 01/05/2024
    Bonjour,
    Il me semble que vous avez fait une erreur avec l'illustration de la Vierge d'Antonello de Messine et que c'est plutôt la copie d'Antonio da Saliba qui est à l'Académie que vous mis à la place. Les différences sont minimes mais réelles.
    Cordialement.
    TW
    • rivagedeboheme
      • rivagedebohemeLe 01/05/2024
      Merci beaucoup pour cette information. Vous avez un œil de spécialiste. Voilà qui est corrigé.
      P. Aulnas

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