Moïse sauvé des eaux. 10 chefs-d’œuvre

 
 
 

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Patrick AULNAS

Le thème pictural Moïse sauvé des eaux s’inspire d’un épisode biblique figurant dans l’Ancien Testament, Pentateuque, Exode 2. Le pharaon ayant donné l’ordre d’éliminer tous les nouveau-nés mâles du peuple hébreu, la mère de Moïse cache l’enfant durant trois mois puis l’abandonne dans une corbeille sur le Nil, près de la rive. La fille du pharaon qui se baignait avec des courtisanes, trouve l’enfant et décide de l’adopter.

Le texte biblique est le suivant :

Un homme de la tribu de Lévi épousa une fille de la même tribu. Elle devint enceinte et donna le jour à un fils. Elle vit que c’était un beau bébé et le cacha pendant trois mois. Quand elle ne parvint plus à le tenir caché, elle prit une corbeille en papyrus, l’enduisit d’asphalte et de poix et y plaça le petit garçon. Puis elle déposa la corbeille au milieu des joncs sur la rive du Nil. La sœur de l’enfant se posta à quelque distance pour voir ce qu’il en adviendrait.

Peu après, la fille du pharaon descendit sur les bords du fleuve pour s’y baigner. Ses suivantes se promenaient sur la berge le long du Nil. Elle aperçut la corbeille au milieu des joncs et la fit chercher par sa servante. Elle l’ouvrit et vit l’enfant : c’était un petit garçon qui pleurait. Elle eut pitié de lui et dit : C’est un petit des Hébreux.

Alors la sœur de l’enfant s’approcha et dit à la fille du pharaon: Veux-tu que j’aille te chercher une nourrice parmi les femmes des Hébreux pour qu’elle t’allaite cet enfant?

La fille du pharaon lui dit : Va!

La jeune fille alla donc chercher la mère de l’enfant.

La princesse lui dit : Emmène cet enfant et allaite-le pour moi. Je te paierai un salaire.

La femme prit l’enfant et l’allaita. Quand il eut grandi, elle l’amena à la fille du pharaon. Celle-ci l’adopta comme son fils et lui donna le nom de Moïse (Sorti), car, dit-elle, je l’ai sorti de l’eau.

A partir du 16e siècle, et jusqu’au 20e siècle, ce thème inspire les peintres. Mais il faut attendre le 19e siècle et la vogue de l’orientalisme pour voir apparaître des paysages et des figures plus ou moins égyptiennes. Auparavant, ni les peintres ni leurs commanditaires n’avaient voyagé en Égypte et ils se contentaient donc de transposer l’épisode biblique dans leur environnement immédiat, aussi bien vestimentaire qu’architectural ou paysager.

 

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Tintoret. Moïse sauvé des eaux (v. 1555)

Tintoret
Moïse sauvé des eaux (v. 1555)
Huile sur toile, 56 × 119 cm, musée du Prado, Madrid.

 

Comme beaucoup d’œuvres de Tintoret, celle-ci ne ressemble à aucune autre. Elle présente même une forte originalité par rapport à l’ensemble de la production de l’artiste, comme l’indique le musée du Prado.
« Cette toile fait partie d’un ensemble de six peintures de facture semblable […] Il n’existe rien de comparable à ces tableaux dans le reste de la production de Tintoret et, par conséquent, il est difficile de les dater avec certitude. La répétition régulière de petites touches calligraphiques dans les glands des robes et des coiffes, les feuilles de la végétation, les frisures des boucles et coiffes féminines, créent un rythme décoratif global qui ne se répètera dans aucune autre œuvre. » (Commentaire musée du Prado)

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Véronèse. Moïse sauvé des eaux (v. 1581)

Véronèse
Moïse sauvé des eaux (v. 1581)

Huile sur toile, 129 × 115 cm, musée des Beaux-arts de Lyon.

 

Paul Véronèse se situe dans le courant maniériste qui domine dans la peinture italienne dans la seconde moitié du 16e siècle. Dans un paysage typiquement européen, l’artiste place des figures caractérisées par une gestuelle et des mimiques appuyées. La fille du Pharaon, en robe du 16e siècle, reste dubitative face à la découverte de l’enfant présenté par deux servantes. La théâtralité est une des caractéristiques de la peinture de Véronèse. Mais l’essentiel se situe dans les couleurs que le peintre conjugue avec génie, depuis les couleurs froides de l’arrière-plan fluvial jusqu’aux rouges et aux jaunes moirés des vêtements.

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Poussin. Moïse sauvé des eaux (1647)

Nicolas Poussin
Moïse sauvé des eaux (1647)
Huile sur toile, 120 × 195 cm, musée du Louvre, Paris.

 

Le Nil apparaît à droite sous la forme d’une figure allégorique avec un sphinx à ses côtés. Ce choix de composition a fait l’objet de commentaires négatifs au 17e siècle. Le commanditaire de l’œuvre, le banquier Jean Pointel, l’appréciait beaucoup de même que Louis XIV. Mais Philippe de Champaigne et d’autres ont reproché à Poussin d’avoir représenté le fleuve sous une forme allégorique. Ces débats n’ont plus grand intérêt aujourd’hui et il reste un chef-d’œuvre du paysage idéalisé.

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Laurent de la Hyre. Moïse sauvé des eaux (1647-50)

Laurent de la Hyre
Moise sauvé des eaux (1647-50)
Huile sur toile, 69,9 × 89,5 cm, Detroit Institute of Arts.

 

Laurent de La Hyre est rattaché à l’atticisme par les historiens de l’art. Le mot provient du terme Attique, qui désignait le territoire de la cité antique d’Athènes. L’atticisme est un courant du classicisme français utilisant abondamment les architectures et les ruines antiques. L’artiste nous propose un Nil parfaitement canalisé et bordé de colonnes gréco-romaines. Les figures, également vêtues à l’antique, correspondent à la représentation idéalisée qui devait apparaître dans le domaine artistique. 

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Sébastien Bourdon. Moïse sauvé des eaux (1655-60)

Sébastien Bourdon
Moïse sauvé des eaux (1655-60)
Huile sur toile, 120 × 173 cm, National Gallery of Art, Washington.

 

La composition de Sébastien Bourbon comporte des plans horizontaux nettement inspirés du tableau de Poussin : les personnages au premier plan, le fleuve et la rive opposée au second plan, puis le ciel à l’arrière-plan. Bourdon accentue la géométrisation par des blocs de pierres et des éléments architecturaux. Les nuages eux-mêmes se découpent en lignes brisées sur le ciel. Cette volonté de soumettre le paysage aux impératifs de la raison correspond aux exigences de l’académisme classique français. Bourdon va plus loin que Poussin dans cette direction en multipliant les figures géométriques simples (rectangles, carrés, triangles, etc.) utilisées pour traiter les bâtiments, donnant ainsi à son tableau un aspect précubiste.

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Elisabetta Sirani. Moïse sauvé des eaux (1660-65)

Elisabetta Sirani
Moïse sauvé des eaux (1660-65)
Huile sur toile, 112,5 × 130 cm, collection particulière.

 

Conformément au style baroque, Elisabetta Sirani choisit un plan rapproché sur quelques personnages, en coupant le reste de la scène. La richesse chromatique est exceptionnelle : rose clair, gris bleu, verts profonds, ocres et rouges. La composition oppose la lumière intense, qui éclaire la fille du Pharaon et le nouveau-né, et l’ombre profonde de l’arrière-plan qu’une trouée vers l’horizon vient atténuer. Ce jeu de clair-obscur, caractéristique du baroque, constitue ici l’armature de la composition. Les visages ont été totalement idéalisés et une nature morte au premier plan vient confirmer l’influence maniériste déjà apparente avec les couleurs.

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Nicolas de Largillière. Moise sauvé des eaux (1728)

Nicolas de Largillière
Moise sauvé des eaux (1728)
Huile sur toile, 74 × 94,5 cm, musée du Louvre, Paris.

 

Sous le règne de Louis XV, le rococo s’impose. Il s’agit de sortir de la solennité et de la rigueur des normes de composition imposées au 17e siècle en France. Nicolas de Largillière envisage donc le thème biblique presque comme une fête galante à la Watteau. Dans un parc comportant quelques sculptures (dont le sphinx) un groupe de femmes découvre un enfant. Elles sont vêtues comme les aristocrates du 18e siècle et leurs petits chiens s’agitent alentour. Le Nil n’apparaît pas et l’Orient est tout juste évoqué par un arbre ressemblant à un palmier et un palais se voulant égyptien en arrière-plan. Le peintre utilise le clair-obscur en concentrant la luminosité sur la fille du pharaon et l’enfant.

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Jean-Jacques Lagrenée. Moïse sauvé des eaux (v. 1785)

Jean-Jacques Lagrenée
Moïse sauvé des eaux (v. 1785)
Huile sur toile, 65 × 52 cm, musée Magnin, Dijon.

 

L’évolution vers le néoclassicisme conduit à retrouver la majesté des figures antiques dans un cadre paysager profond où apparaît le fleuve. La fille du Pharaon, d’un geste impérieux, ordonne à ses suivantes de recueillir l’enfant. La maîtrise chromatique et le traitement de la lumière filtrant à travers l’arbre font de ce petit tableau une des grandes réussites sur le sujet.

 

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Edwin Long. La fille du pharaon (v. 1886)

Edwin Long
La fille du pharaon (v. 1886)
Huile sur toile, 196,7 × 276,8 cm,  Bristol Museum & Art Gallery, England.

 

Le courant orientaliste apparaît au 19e siècle comme une des tendances de l’académisme. Les orientalistes appartiennent principalement aux grandes puissances coloniales de l’époque, la Grande-Bretagne et la France. Le peintre britannique Edwin Long cherche à se rapprocher de la réalité égyptienne, mais d’une réalité fantasmée par les artistes. Le nu féminin, jugé oriental, tient une grande place dans l’univers mental des peintres de ce courant, qui sont tous des hommes.

 

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Lawrence Alma-Tadema. La découverte de Moïse (1904-05)

Lawrence Alma-Tadema
La découverte de Moïse (1904-05)
Huile sur toile, 137 × 213, collection particulière.

 

Le peintre anglo-néerlandais Lawrence Alma-Tadema réalise au début du 20e siècle le dernier tableau de style académique consacré au sujet. Le commanditaire, Sir John Aird (1833.-1911) invita l’artiste en Égypte en 1902 lors de l’inauguration du premier barrage d’Assouan. L’œuvre est donc plus proche de la réalité égyptienne que les précédentes, avec un Nil très crédible et des esclaves travaillant à la construction d’une pyramide sur la rive opposée. La fille du Pharaon est transportée par des esclaves sur une chaise richement décorée. Deux servantes portent le berceau de Moïse et deux serviteurs agitent des éventails en plumes d’autruche au-dessus de la princesse. La composition s’articule en cinq plans horizontaux où dominent successivement les nuances de bleu et d’ocre avec en contrepoint des blancs plus ou moins grisés. Les fleurs, des delphiniums, permettent de créer un premier plan bleu répondant au fleuve et au ciel qui constituent les troisième et cinquième plans. Le tableau n’a cessé de prendre de la valeur depuis la décennie 1960. Vendu pour 8 500 dollars en 1967, il a atteint le prix de 36 millions de dollars en 2015 chez Sotheby’s.

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