Dette publique : le déni français

15/09/2025

Patrick AULNAS

Les gouvernements se succèdent en France sans qu’aucune réforme de structure ne soit proposée. La France est dans le déni de réalité. Plus exactement, deux blocs électoraux opposés, le RN et le NFP, proviennent de tactiques électorales masquant la situation réelle. Les électeurs de gauche et ceux du RN ont été infantilisés. Ils pensent désormais que quelques mesures politiques simples pourraient résoudre les problèmes du pays tout en leur étant très favorables économiquement.

Il n’en est rien. Il faut en effet repenser entièrement l’État-providence à la française.

 

45 ans de déni et d’infantilisation

Les 3450 milliards de dette accumulée par les pouvoirs publics résultent de 45 ans de gestion défaillante. Les débats médiatiques incriminent Macron, Hollande ou Sarkozy pour infantiliser toujours plus les citoyens. Cela est absurde. En vérité, depuis 1981, début du premier septennat de François Mitterrand, la France a sombré dans le déni de réalité car aucun politicien n’a eu le courage de présenter aux Français la situation économique du pays. Valéry Giscard d’Estaing, de 1974 à 1981, et son Premier ministre Raymond Barre, ont été les derniers gouvernants à faire face et à maintenir une bonne gestion financière publique.

 

Dégradation économique et démographique

L’évolution de la situation économique globale peut être appréciée simplement avec quelques chiffres.

- Le taux de croissance annuel du PIB n’a cessé de décroître de décennie en décennie : d’environ 5% dans les années 1960, il passe à 4% dans les années 1970 et se situe autour de 1% à partir de 2010. Il faut 15 ans pour doubler la richesse d’un pays avec un taux de croissance de 5% mais 70 ans avec un taux de 1%. Le ressenti est radicalement différent : optimisme et progrès ou impression de stagnation, voire de recul.

- Le solde des échanges extérieurs de biens et de services n’a cessé de se dégrader au 21e siècle. Il était positif de 44 milliards en 1997 et négatif de 56 milliards en 2023. L’appareil productif français n’est plus suffisamment compétitif sur les marchés internationaux.

- L’indice de fécondité (nombre d’enfants nés vivants par femme) était de 2,1 en 1974, de 1,8 en 1988 et de 1,6 en 2023. Le renouvellement de la population suppose un indice de 2,1. C’est par l’immigration massive et incontrôlée, posant d’énormes problèmes d’intégration, que la France a comblé son déficit de naissances.

 

Dépenser sans tenir compte de la dégradation

Comment les gouvernants français ont-ils répondu à cette dégradation économique et démographique ? Tout simplement en cherchant à la cacher à leurs électeurs. Ils ont toujours accepté de satisfaire les demandes de leur base électorale. Ils n’ont jamais expliqué que l’époque fastueuse des Trente Glorieuses était une exception et que la fête était terminée. Le déni de réalité français a désormais un demi-siècle.

Quelques chiffres permettent d’illustrer ce phénomène. Le nombre d’emplois publics était de 4,6 millions en 1980, de 5,6 millions en 2019 et même de 6,1 millions en comptant les effectifs des entreprises publiques.

Entre 1995 et 2023, les dépenses publiques de retraite ont augmenté de 1,7 points de PIB, passant de 110 à 302 milliards d’€. Les dépenses publiques de santé ont augmenté de 1,8 point de PIB, passant de 80 à 239 milliards d’€. La gestion du système de retraite par répartition et du système de santé entièrement collectivisé n’est absolument pas maîtrisée. Les dépenses dérivent.

La dette publique représentait 21% du PIB en 1981, 91% en 2012 et 111% en 2024. Ce surendettement a permis de payer les fonctionnaires, les retraités, les dépenses de santé et de nombreuses autres dépenses publiques en augmentation constante.

 

Nier l’évidence

Il est intéressant de constater à quel point les politiciens de gauche principalement peuvent nier les évidences les plus élémentaires avec l’appui de quelques macro-économistes. Ces derniers expliquent que la dette publique n’est pas vraiment un problème, que la France n’est pas le Grèce, qu’il n’y aura pas de défaut de paiement français.

En réalité, personne ne sait comment peut évoluer la situation sur plusieurs années. Ces propos d’économistes sont d’une légèreté blâmable. Chacun comprend, même sans aucune formation économique et financière, qu’il est dangereux et fortement déconseillé de s’endetter à l’excès pour payer des dépenses courantes. Contrairement à ce que prétendent certains politiciens appuyés par des pseudo-spécialistes, il s’agit là d’une vérité basique qui s’applique aussi bien à la puissance publique qu’aux personnes privées, entreprises ou particuliers.

Tout se passe comme si la passion politique et idéologique faisait perdre tout bon sens à certaines personnes. Il est évident qu’accumuler de plus en plus de dettes pendant des décennies est gravissime. Le discours déresponsabilisant de la classe politique a fonctionné longtemps. Mais c’est aujourd’hui terminé. Le déni de réalité ne peut être éternel.

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