Ukraine-Russie : le choix de la liberté ou de la servitude

15/09/2022

Patrick AULNAS

Décidément, on n’en finira jamais avec la liberté. Le monde se partage entre ses partisans et ses adversaires. Nous autres occidentaux avions cru un instant, après la chute de l’URSS, à la fin de l’Histoire (Francis Fukuyama). Finie la guerre froide, fini le conflit de plusieurs siècles entre la démocratie et l’autocratie. Les fascistes, les nazis, les communistes avaient été vaincus et la démocratie libérale allait conquérir le monde. Eh bien non ! Les ennemis de la liberté résistent par tous les moyens mais la guerre en Ukraine nous montre que les peuples peuvent choisir la liberté.

 

Le choix des ukrainiens et celui des russes

La guerre en Ukraine représente un évènement majeur de l’histoire de l’humanité. Elle oppose en effet une nation cherchant à sortir de la servitude ancestrale dans laquelle elle était plongée et une dictature ne connaissant que le mensonge et la violence. Cette guerre met en évidence le choix dont dispose les peuples : liberté ou servitude. Après avoir été soumise pendant des siècles aux tsars de Russie puis aux dictateurs communistes de l’URSS, les ukrainiens ont opté pour la démocratie et la liberté. Le peuple russe, lui, ne s’est jamais vraiment soulevé contre l’oppression. En passant du tsarisme au communisme, par la supercherie idéologique qualifiée dictature du prolétariat dans la littérature marxiste-léniniste, la population russe a été trompée par des leaders assoiffés de pouvoir (Lénine, Staline et leurs successeurs) mais elle s’est en définitive soumise à la tyrannie communiste. Elle se soumet aujourd’hui à la dictature nationaliste de Poutine.

 

La grande question européenne : se chauffer !

Il faut donc impérativement que le camp du bien, celui de la liberté, l’emporte. Les européens subissent les conséquences de cette guerre par l’augmentation du prix de l’énergie. La grande question, développée à foison dans les médias, est la suivante : faudra-t-il se chauffer à 19° l’hiver prochain ou faudra-t-il descendre plus bas ? 17°, c’est assurément la catastrophe.

Le ridicule de notre débat sur la « précarité énergétique » repose en grande partie sur l’ignorance du passé. Avant la seconde guerre mondiale, il n’était pas question de chauffer les locaux pendant l’hiver à des températures supérieures à 20°. Le confort douillet, présenté comme un droit par la classe politique occidentale, ne vise qu’à tromper les peuples sur la réalité de la situation. Quand les ukrainiens se battent et meurent pour notre liberté, j’ai honte d’entendre les jérémiades sur un degré de plus ou de moins. Mettez trois pulls et deux paires de chaussettes braves gens et ne pleurez pas pour si peu. Ce ne sont là que des détails sans importance. Nous pouvons vivre avec beaucoup moins d’énergie.

Bien sûr, l’énergie est nécessaire à tous les niveaux, qu’il s’agisse de production ou de distribution, mais son abondance conduisait à des abus. L’énergie plus rare devient plus chère et suscite une inflation plus ou moins élevée. Là encore, le vocabulaire médiatique provoque une inutile dramatisation. Dans les cours universitaires d’économie des années 1960, le terme inflation galopante était parfois utilisé pour qualifier l’inflation allemande des années 1920 (1000% par jour, soit disparition de la monnaie). On utilisait l’expression inflation rampante pour la petite inflation qui existait dans les décennies d’après-guerre en Occident (5 à 10% par an). N’était-ce pas plus réaliste ? Il n’existe absolument pas aujourd’hui d’inflation incontrôlée risquant d’aboutir à un effondrement de la monnaie mais une inflation par les coûts, plus ou moins forte selon les pays. Rien de dramatique.

 

Nationalistes et néo-communistes occidentaux

La prétendue « crise énergétique » n’existe donc que dans les esprits embrumés par l’addiction à la facilité. Ce qui compte vraiment, c’est de poursuivre le soutien militaire, économique et humanitaire à l’Ukraine car elle défend nos valeurs avec un courage qui semble bien nous faire défaut. Il ne faut pas s’étonner des réserves émises par les nationalistes et les néo-communistes occidentaux. Dans la première catégorie figurent les populistes de droite (RN en France, Ligue en Italie, AFD en Allemagne, etc.) qui observent la dictature russe avec bienveillance et pour les plus extrémistes avec admiration. Ce ne sont pas vraiment des démocrates.

La seconde catégorie est constituée des gauches radicales qui ont succédé aux marxistes en conservant l’anticapitalisme comme cœur de doctrine (LFI en France, Parti du travail en Belgique, Podemos en Espagne, etc.). Tous ces mouvements se caractérisent par un tropisme pseudo-révolutionnaire mais se manifestent surtout par des propositions démagogiques sur le plan économique, visant une autre répartition des richesses. Férocement antiaméricaine, cette extrême-gauche ne peut pas soutenir avec conviction le peuple ukrainien, dont la victoire dépend principalement des États-Unis. Elle prétend donc être du côté de la paix. Voilà à nouveau une habileté rhétorique qui ressemble à un mensonge : « nous ne sommes pas pour Vladimir Poutine mais pour la paix ». Laquelle ? Celle de l’acceptation du fait accompli, c’est-à-dire l’annexion par la Russie de la Crimée et de l’Est de l’Ukraine. Ces munichois du 21e siècle ne sont pacifistes que par électoralisme. Leurs électeurs appartiennent en effet aux catégories sociales qui supportent le plus difficilement la hausse du prix de l’énergie.

 

La défaite russe, si nous le voulons

La guerre en Ukraine est emblématique du problème politique majeur depuis le 18e siècle : liberté ou servitude. Ne faisons pas le choix de la servitude en abandonnant les ukrainiens pour quelques degrés de plus dans nos demeures et bureaux ou quelques pourcents de moins sur les prix. Poutine et sa clique vont perdre car ils ne sont porteurs d’aucun espoir. Seuls les mensonges et la violence les maintiennent au pouvoir. Leur défaite, inéluctable si nous le voulons, sera un progrès historique de la liberté.

Publié sur Contrepoints le 15/09/2022

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