Ambrogio Lorenzetti

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Patrick AULNAS

Biographie

v. 1290-1348

La vie de cet artiste important du 14e siècle se déroule principalement entre Sienne et Florence, deux villes distantes de 70 kilomètres. Ambrogio Lorenzetti naît à Sienne vers 1290 dans une famille dont on ignore tout mais attirée par l’art de peindre puisque son frère aîné Pietro (v. 1280-1348) devint également peintre. Les historiens s’accordent sur sa formation dans l’atelier de Duccio di Buoninsegna (v. 1255-1318), artiste majeur, avec Giotto (v. 1267-1337), du renouveau de la peinture occidentale à la fin du 13e siècle. A partir de critères stylistiques, certains historiens pensent même qu’Ambrogio Lorenzetti serait l’élève de Giotto et non de Duccio.

La première œuvre attribuée à l’artiste est une Vierge à l’Enfant réalisée en 1319 pour l’église de San Casciano in Val di Pesa, commune située entre Sienne et Florence.

 

Ambrogio Lorenzetti. Madone de Vico l'Abate (1319)

Ambrogio Lorenzetti. Madone de Vico l'Abate (1319)
Tempera et or sur bois, 150 × 78 cm, musée de San Casciano, San Casciano in Val di Pesa.

 

La vie de Lorenzetti se partage ensuite entre Sienne et Florence. Quelques documents indiquent en effet la présence du peintre à Florence dans la décennie 1320 : une dette entraînant la saisie d’une peinture en 1321, une inscription à la corporation des métiers de la ville en 1328. En 1324, Lorenzetti acquiert une maison à Sienne. Sur le plan artistique, sa réputation locale est déjà solidement établie entre 1320 et 1330 et il reçoit de nombreuses commandes en provenance de Sienne et de Florence.

Au début de la décennie 1330, l’artiste travaille beaucoup à Florence pour créer certaines de ses œuvres majeures, comme le Triptyque de saint Procule.

 

Ambrogio Lorenzetti. Triptyque de saint Procule (1332)

Ambrogio Lorenzetti. Triptyque de saint Procule (1332)
Tempera et or sur bois, 171 × 57 cm (panneau central), 141 × 43 (panneaux latéraux), Galerie des Offices Florence.

 

Ambrogio Lorenzetti revient à Sienne vers 1335 et réalise avec son frère des fresques, aujourd’hui disparues, dans l'hôpital Santa Maria della Scala et dans la Basilique San Francesco. Il reçoit de nombreuses commandes religieuses de la région siennoise et, en 1337, la République de Sienne lui commande un ensemble de fresques allégoriques devant évoquer les effets du bon et du mauvais gouvernement sur la ville et la campagne. Ces fresques, représentant des paysages fortement animés par la présence des hommes, figurent parmi les premières véritables peintures paysagères de l’art occidental et préfigurent les paysages-monde du 16e siècle.

 

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne, détail (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne (1337-39)
Fresque, Palazzo pubblico, Sienne.

 

Dans la dernière partie de sa vie, la créativité de d’Ambrogio Lorenzetti ne faiblit pas, bien au contraire. Le peintre apparaît comme un coloriste exceptionnel, osant des associations très innovantes, comme le montre sa Présentation au temple.

 

Ambrogio Lorenzetti. Présentation de Jésus au temple (1342)

Ambrogio Lorenzetti. Présentation de Jésus au temple (1342)
Tempera et or sur bois, 257 ×168 cm, Galerie des Offices, Florence.

 

Ambrogio Lorenzetti meurt en 1348 au cours de l’épidémie de peste (dite peste noire) qui décime l’Europe et le monde au milieu du 14e siècle. Son frère Pietro et probablement toute la famille disparaissent également cette année-là. Cette pandémie a entraîné la mort d’environ 25 millions de personnes en Europe entre 1347 et 1352.

Giorgio Vasari évoque assez longuement l’œuvre d’Ambrogio Lorenzetti et il le décrit comme un homme cultivé et aimable :

« Ambrogio se retira ensuite à Sienne, où il passa le reste de ses jours. Dans sa jeunesse, il s’était adonné aux lettres avec succès ; aussi ses talents et son caractère aimable le firent rechercher par les gens de bien et de mérite, et lui procurèrent des emplois utiles et honorables dans sa patrie. Il vivait plutôt en gentilhomme et en philosophe qu’en artiste, et supportait avec une égale sérénité d’esprit le bien et le mal que lui envoyait la fortune » (*)

 

Œuvre

Avec Florence, Sienne était le principal centre économique, politique et culturel de la Toscane à la fin du Moyen Âge et au début de la Renaissance. Les historiens ont donc qualifié École siennoise les réalisations picturales des artistes de cette ville du 13e au 15e siècle. Ambrogio Lorenzetti se classe, avec Duccio di Buoninsegna et Simone Martini, parmi les plus grands artistes de cette école au cours de la pré-Renaissance.

La peinture d’Ambrogio Lorenzetti se détache progressivement de l’austérité encore présente de l’art byzantin pour investir les figures religieuses de véritables émotions humaines. Fresques, polyptyques et œuvres de petit format sont l’occasion de représenter la Vierge, les saints et les scènes bibliques comme une idéalisation de l’humanité. La couleur, associée au fond or, joue un rôle majeur dans cette recherche. Dans ce domaine, Lorenzetti se libère progressivement de la rigueur de ses devanciers et devient l’un des plus grands coloristes du siècle.

 

Ambrogio Lorenzetti. Maestà (1335-36)

Ambrogio Lorenzetti. Maestà (1335-36)
Tempera sur bois, 161 × 206,5 cm, Museo d’Arte Sacra di San Pietro all’Orto, Massa Marittima.

 

Le second aspect de l’œuvre du peintre l’amène, de façon très originale pour l’époque, sur le terrain politique. Quels sont les effets visibles du gouvernement des hommes sur le paysage urbain et sur la campagne ? Voilà la question à laquelle Ambrogio Lorenzetti a répondu avec brio dans ses fresques allégoriques sur le bon et le mauvais gouvernement.

 

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la campagne (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la campagne (1337-39)
Fresque, Palazzo pubblico, Sienne.

Tempera sur bois 

Ambrogio Lorenzetti. Madone de Vico l'Abate (1319)

Ambrogio Lorenzetti. Madone de Vico l'Abate (1319). Tempera et or sur bois, 150 × 78 cm, musée de San Casciano, San Casciano in Val di Pesa. « La Madonna di Vico l'Abate réalisée pour l'église de Sant'Angelo di Vico l'Abate près de San Casciano in Val di Pesa, et exposée au musée Giuliano Ghelli de San Casciano, est considérée comme la première œuvre parmi celles attribuables à Ambrogio Lorenzetti […]
Dans ce tableau, les physionomies de Marie et de l'Enfant ne sont pas très douces. Les personnages ont une présence sculpturale puissante, qui fait également écho aux statues d'Arnolfo di Cambio. La représentation de la Vierge est frontale, à la manière byzantine et rappelle les œuvres de la seconde moitié du XIIIe siècle (certains experts ont même avancé l'hypothèse que le commanditaire a explicitement demandé à l'auteur de se référer au style de l'époque). Le manteau de la Madone est rendu avec une couleur compacte et avec des plis peu marqués dans la draperie. Les visages ont une caractérisation en clair-obscur qui n'est pas excellente et le trône est un simple siège angulaire en bois qui présente des décorations géométriques ; l'architecture est réduite au minimum. Telles sont probablement les limites d'un jeune peintre qui, cependant, connaîtra plus tard une évolution vertigineuse.
Cependant, le naturalisme ardent dans le rendu des personnages est déjà remarquable dans ce premier tableau et anticipe ce qui sera l'une des contributions majeures d'Ambrogio à l'histoire de l'art. Les mains de Marie tiennent le bébé au lieu de l'entourer. La main droite est inclinée par rapport à l'avant-bras pour tenir la jambe droite de Jésus. Les doigts des deux mains ne sont pas parallèles, mais ont une disposition leur permettant de mieux soutenir l'enfant. L'index de la main droite se démarque et donne un naturalisme fonctionnel au geste jamais vu auparavant. L'enfant regarde sa mère ; ses poignets et le raccourci de son pied gauche montrent un enfant tremblant et donnant des coups de pied comme un vrai nourrisson. » (Commentaire Arte in Toscana)

Ambrogio Lorenzetti. Vierge à l’Enfant avec Marie Madeleine et sainte Dorothée (v. 1325)

Ambrogio Lorenzetti. Vierge à l’Enfant avec Marie Madeleine et sainte Dorothée (v. 1325). Tempera sur bois, 90 × 53 cm (panneau central), 88 × 39 cm (chaque panneau latéral), Pinacoteca Nazionale di Siena. Les trois tableaux se trouvaient à l’origine dans l’église de l’ancien couvent de Santa Petronilla à Sienne et ils ont été recomposés en un triptyque conservé à la Pinacothèque de Sienne. Le peintre a voulu humaniser la Vierge à L’Enfant en représentant la tendresse maternelle.
Marie-Madeleine (à gauche) est un personnage du Nouveau Testament, disciple de Jésus-Christ. Des développements ultérieurs, ne reposant sur rien de tangible, en feront une pécheresse. Cette réputation lui est restée, d’où sa représentation fréquente en pénitente. Son attribut le plus fréquent est le vase à nard (parfum oriental) dont elle oint les pieds de Jésus lors d’une visite chez Simon.
Dorothée (à droite) fut torturée et décapitée à Césarée en 311. En chemin vers le supplice, l’avocat Thephilius lui dit pour se moquer : « Nouvelle épouse du Christ, envoie-moi quelques fruits du jardin de ton époux. » Elle est la patronne des jardiniers et des fleuristes.

Ambrogio Lorenzetti. Triptyque de saint Procule (1332)

Ambrogio Lorenzetti. Triptyque de saint Procule (1332). Tempera et or sur bois, 171 × 57 cm (panneau central), 141 × 43 (panneaux latéraux), Galerie des Offices Florence. La Vierge à L’Enfant, à mi-corps, est entourée de saint Nicolas (à gauche) et de saint Procule (à droite). La Vierge, vêtue comme une femme de la noblesse du 14e siècle, a un geste de tendresse envers son Enfant, qui l’observe avec la bouche entrouverte. L’humanisation des figures divines, encore rare au début du 14e siècle, reste l’apanage des plus grands artistes. Le pendentif de corail rouge au cou de Jésus préfigure le sang de la Passion. Le soin exceptionnel apporté aux détails apparaît tout particulièrement dans les vêtements des trois personnages.
Nicolas de Myre ou Nicolas de Bari (v. 260-345) est un évêque de l’Empire romain d’Orient qui est crédité par l’Église de plusieurs miracles. Il devient par la suite très populaire et la Saint-Nicolas (6 décembre) est encore fêtée aujourd’hui dans de nombreux pays (Belgique et Pays-Bas par exemple). Procule ou Procole (du latin Proculus) est un officier romain persécuté sous l’empereur romain Dioclétien (244-312) pour sa foi chrétienne. Son culte à Bologne a des origines très anciennes.

Ambrogio Lorenzetti. Scènes de la vie de saint Nicolas (v. 1330-35)

Ambrogio Lorenzetti. Scènes de la vie de saint Nicolas (v. 1330-35). Tempera sur bois, 96 × 52 cm, Galerie des Offices, Florence. « Les deux épisodes représentés sont tirés de la vie de saint Nicolas, évêque de Myre (270-343), racontée dans La Légende dorée de Jacques de Voragine (XIIIe siècle). Sur le tableau, les épisodes s’observent de bas en haut.
Dans le premier épisode, l’évêque Nicolas se rend au port pour demander aux marins des navires transportant des céréales à Alexandrie en Égypte d’en donner à la ville de Myre, qui avait été frappée par la famine. Les marins suivent l’ordre de Nicolas et les navires sont miraculeusement réapprovisionnés en grains, de sorte que lorsque les marins atteignent leur destination, il n’y a pas de pénurie dans leur cargaison.
Le deuxième épisode fait référence à un miracle accompli par saint Nicolas après sa mort. Le jour de la fête de la Saint-Nicolas, un enfant est tué par le diable, déguisé en pèlerin, à qui l’enfant aurait fait l’aumône. Invoqué par le père de la victime, un dévot du saint, Nicolas ramène l’enfant à la vie, à la grande stupéfaction et à la joie des personnes présentes.
Le panneau fait partie d’une paire de peintures ayant pour thème des épisodes de la vie de Saint-Nicolas […], dont la structure globale reste encore aujourd’hui une source de mystère. La présence d’éléments en forme de charnières le long de l’un des deux côtés de chaque panneau suggère qu’il s’agissait des éléments latéraux d’un retable, avec probablement la figure du saint au centre. Arrivés à la Galerie florentine en provenance de l’abbaye bénédictine de Santa Maria à Florence, les panneaux faisaient à l’origine partie du mobilier d’une église voisine nommée d’après saint Proculus. Ils sont un témoignage exceptionnel de l’activité du peintre Ambrogio Lorenzetti, né à Sienne, qui fait preuve non seulement d’un talent extraordinaire de conteur, mais aussi d’une passion pour les orchestrations spatiales complexes et d’une grande habileté dans la représentation des architectures. » (Commentaire Galerie des Offices)

Ambrogio Lorenzetti. Maestà (1335-36)

Ambrogio Lorenzetti. Maestà (1335-36). Tempera sur bois, 161 × 206,5 cm, Museo d’Arte Sacra di San Pietro all’Orto, Massa Marittima. « Dans une composition pyramidale qui culmine au centre du retable se détachent, représentées à une échelle qui surpasse tous les autres personnages, les figures de la Vierge et de l’Enfant autour desquelles s’articule le programme iconographique complexe de cette Maestà. La typologie de la Vierge peinte par Ambrogio est inspirée du modèle byzantin de la Glikophilosa (**) déjà adopté dans les précédents grands modèles que sont la Maestà de Duccio ou celle de Simone Martini. Dans le cas présent, l’artiste renouvelle le thème en unissant dans une plus grande étroitesse les visages et les regards mutuels de la mère et de l’enfant, tout en évoquant une formule mise en œuvre plus discrètement par Duccio. Tous deux sont assis sur un trône hissé au sommet de trois marches. Ces marches, qui montent vers le trône marial, se distinguent les unes des autres par leur couleur respective, blanc, vert, rouge ; sur chacune d’elles, ont pris place trois figures féminines dont les ailes signalent le caractère allégorique : il s’agit des trois Vertus théologales – Foi, Espérance, Charité – que l’on peut identifier grâce à leurs attributs symboliques […]
La foule des personnages qui constituent la cour céleste est particulièrement dense. On y distingue, occupant les lunettes formées au sommet du support pictural, des prophètes qui tous, depuis la nuit des temps, ont préfiguré la venue du Christ et l’avènement d’une ère nouvelle. De part et d’autre du trône de la Vierge, les saints sont alignés sur plusieurs rangées. » (Commentaire Guide artistique de la province de Sienne)

Ambrogio Lorenzetti. Vierge à l'enfant avec les saints Cécile, Pierre, Paul et Michel Archange (v. 1340)

Ambrogio Lorenzetti. Vierge à l'enfant avec les saints Cécile, Pierre, Paul et Michel Archange (v. 1340). Tempera et or sur bois, 79 × 50 cm (Vierge à l’Enfant), 108 × 35 cm (les quatre saints), 55 × 20 cm (Rédempteur bénissant), Museo diocesano, Sienne. « Grâce à l’exposition qui a eu lieu à Sienne en 2017-2018, le polyptyque restauré a retrouvé la séquence originaire de ses différents compartiments, de part et d’autre de la Vierge à l’Enfant qui en occupe le panneau central, conformément à la description donnée par Uberto Benvoglienti […]
Les figures des saints qui encadrent la Vierge et l’Enfant sont Pierre, revêtu de la pourpre et du pallium, Paul, portant une épitre adressée aux Romains, une autre à Titus, l’archange Michel, "représenté comme un général romain de l’Antiquité" (***), et, à gauche, une sainte qui n’a pas toujours été convenablement identifiée […] Cécile est représentée avec le même diadème dans le polyptyque de Santa Cecilia a Crevole peint par Pietro Lorenzetti.
"Les ailes de l’archange, avant la transformation du vernis, étaient d’un rose ténu et contribuaient à alimenter la grande richesse chromatique de l’ensemble dans lequel, encore aujourd’hui, on peut observer la première apparition de ce type particulier de tons qui caractérisent la production tardive du maître. " (***) (Commentaire Guide artistique de la Province de Sienne)

Ambrogio Lorenzetti. Présentation de Jésus au temple (1342)

Ambrogio Lorenzetti. Présentation de Jésus au temple (1342). Tempera et or sur bois, 257 ×168 cm, Galerie des Offices, Florence. Selon l’apôtre Luc, l’Enfant Jésus fut présenté au temple de Jérusalem où l’accueillit Syméon, qui avait été averti par le Saint-Esprit qu’il ne mourrait pas avant d’avoir vu le Christ. Syméon est le deuxième chef de l’église de Jérusalem et le cousin de Jésus-Christ selon la tradition.
« La scène se déroule exactement entre deux colonnes graciles qui soulignent la frontière invisible séparant le réel où se trouve le spectateur, et l’espace de la représentation. La cérémonie s’achevant, le Grand-Prêtre procède aux inscriptions dans le registre. Marie s’apprête à reprendre l’Enfant-Jésus des bras de Siméon […]
Derrière l’autel, le Grand-Prêtre se tient prêt pour le sacrifice, les deux colombes dans une main et le couteau dans l’autre. La flamme de l’holocauste brûle sur l’autel. On aperçoit à ses côtés les officiants qui doivent l’assister au cours de la cérémonie. A droite enfin, se tient Anne, la Prophétesse […]
Comme on le constate souvent dans la peinture médiévale, il est possible de voir l’intérieur en même temps que l’extérieur de l’édifice où se déroule la scène. Dans le cas présent, Lorenzetti a conçu l’ensemble du décor de cet édifice, aussi bien dedans que dehors, en y faisant fourmiller les informations visuelles qui résonnent comme autant de commentaires de la scène principale […]
Grâce à deux descriptions du XVe siècle, on sait que l’œuvre d’Ambrogio Lorenzetti faisait partie, à l’origine, d’un polyptyque. Comme tous les retables qui constituaient l’ensemble consacré aux quatre Protecteurs de la cité dans le transept de la Cathédrale, il possédait deux volets latéraux sur lesquels on pouvait voir l’Archange Michel et saint Crescenzio martyr (tenant sa tête dans la main ?), ainsi qu’une prédelle. » (Commentaire Guide artistique de la Province de Sienne)

Ambrogio Lorenzetti. Annonciation (1344)

Ambrogio Lorenzetti. Annonciation (1344). Tempera et or sur bois, 130 × 150 cm, Pinacoteca Nazionale di Siena. L’archange Gabriel (à gauche) annonce à la Vierge Marie la naissance prochaine du Christ (maternité divine de la Vierge selon le dogme chrétien). Les paroles échangées ont été peintes, sortant de la bouche des protagonistes. L’archange prononce ces mots : "Je te salue Marie, toi comblée de grâce, le Seigneur est avec toi". La Vierge répond : "Je suis la servante du Seigneur." Cette Annonciation a été commandée au peintre par l’Office de la Gabelle de Sienne pour décorer un mur du Palais communal.
« Dans ce format carré, Ambrogio installe méticuleusement les deux protagonistes de la scène. À cet effet, il divise la surface disponible en deux parties grâce à un axe central figuré ici par une colonne dont les formes ne sont pas dessinées mais gravées à même le support, délimitant ainsi deux espaces spécifiques couverts par un arc en plein cintre et reliés au sol par le biais d’un fond d’or qui recouvre la surface pour rejoindre un pavement géométrique, lequel introduit un principe de profondeur susceptible d’accueillir les puissantes silhouettes des deux protagonistes. On a beaucoup écrit sur la représentation de ce pavement, première tentative réussie, bien qu’essentiellement empirique, de transposer sur une surface bidimensionnelle, au moyen de la perspective, une réalité en trois dimensions. » (Commentaire Guide artistique de la Province de Sienne)

Ambrogio Lorenzetti. La Charité de saint Nicolas de Bari (1342-44)

Ambrogio Lorenzetti. La Charité de saint Nicolas de Bari (1342-44). Tempera sur bois, 30 × 20,5 cm, musée du Louvre, Paris. « La scène se déroule dans espace extérieur étroit qui s’ouvre vers l’intérieur d’une pièce dont l’une des parois s’enfonce dans la profondeur grâce à un effet de perspective crédible. Cet effet, d’une grande nouveauté, est renforcé par la présence du pilastre blanc qui, sur la droite, cache une grande partie des trois jeunes filles allongées dans le lit dont Gina Lullo dit que l’on "pourrait presque le toucher tant la couverture, le drap brodé et la douceur du long édredon semblent vrais".
L’effet de profondeur est encore accentué par le morceau de mur blanc où s’ouvre la fenêtre par laquelle Nicolas, qui s’est hissé sur la pointe des pieds pour l’atteindre, jette les trois bourses d’or destinées à doter les trois jeunes filles pauvres que leur père s’était résigné à prostituer faute d’argent pour les marier … Ce pan de mur, s’il semble peu utile pour définir une architecture fonctionnelle, se révèle extrêmement efficace pour créer un effet de boîte, de creux, et donc de profondeur que soulignent les variations des gris chargés de marquer les ombres sur la paroi et au plafond de cet étrange habitacle. L’effet est si réussi que Gina Lullo évoque à cette occasion, avec une admiration que l’on ne peut que partager, les "révolutions incessantes et continues auxquelles Ambrogio nous a habitués" de longue date.
Comme cela arrive souvent dans la représentation de cette scène fameuse, tandis que ses deux sœurs dorment profondément, l’une des trois jeunes filles assiste avec ravissement au miracle de générosité qui est en cours. Allongé sur un coffre de rangement en bois placé le long du lit (il s’agit d’un détail de la vie quotidienne véritablement observé), le père des trois infortunées jeunes filles est également témoin. » (Commentaire Guide artistique de la Province de Sienne)

 

Les fresques des effets du bon et du mauvais gouvernement, Sienne (1337-1339)

En 1337, la République de Sienne commande à Ambrogio Lorenzetti un ensemble de fresques ayant pour thème les effets du bon et du mauvais gouvernement et devant orner la Sala dei Nove (la salle des Neuf) du Palazzo Pubblico de Sienne. Dans cette salle se réunissaient les neuf citoyens qui gouvernaient la République. Les fresques sont exécutées entre 1337 et 1339 et comportent plusieurs tableaux ayant pour thème successifs les effets du gouvernement sur la ville et la campagne, selon qu’il soit bon ou mauvais. Cette thématique offre l’occasion de peindre des paysages avec une approche morale.

 

Ambrogio Lorenzetti. Vue générale des fresques du bon gouvernement

Ambrogio Lorenzetti. Vue générale des fresques du bon gouvernement

 

La photographie représente les fresques concernant les effets du bon gouvernement dans la ville et la campagne. La taille de la Sala dei Nove (Salle du conseil des Neuf) est de 14 × 7,7 mètres.

 

 

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la ville (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la ville (1337-39). Fresque, Palazzo pubblico, Sienne. L’opulence règne sur la ville et les artisans sont occupés par leurs activités productives. Un groupe de danseurs vient cependant égayer l’espace public. Ce paysage urbain est évidemment extrêmement idéalisé et ne comportent que palais et belles demeures. Les commanditaires étant les responsables politiques de Sienne, il était nécessaire de louer à l’excès leur réussite.

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la ville, détail (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la ville, détail (1337-39). Des maçons travaillent à la construction d’un nouveau bâtiment.

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la ville, détail (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la ville, détail (1337-39). Le mauvais gouvernement conduit au relâchement. Les bâtiments de la ville ne sont plus entretenus et se dégradent.

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne (1337-39). Fresque, Palazzo pubblico, Sienne. Ce vaste paysage permet de mettre en évidence les possessions de Sienne et la richesse de sa production agricole. Un tel paysage est une rareté à cette époque. Il préfigure le paysage-monde dans lequel excellera Joachim Patinir au début du 16e siècle.

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne, détail (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du bon gouvernement sur la campagne, détail (1337-39). Lorenzetti ne cherche pas à restituer la réalité de la vie campagnarde. Il fait coexister des activités qui sont en réalité dissociées : semailles, moisson, battage du grain, vendanges. Le lien entre ville et campagne est symbolisé par le groupe de cavaliers à gauche qui sort de la ville pour aller chasser (un faucon est perché sur le bras tendu d’un cavalier). Il s’agit également de marquer le pouvoir de la noblesse sur le territoire : elle seule possède le droit de chasser.

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la campagne (1337-39)

Ambrogio Lorenzetti. Effets du mauvais gouvernement sur la campagne (1337-39). Fresque, Palazzo pubblico, Sienne. La campagne subit les affres de la guerre. Les soldats parcourent les champs et détruisent les cultures. Les habitations sont incendiées

 

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Ambrogio Lorenzetti

 

 

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(*) Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes (première édition 1550, remaniée en 1568, traduction Leclanché, 1841)

 

(**) La Madone Glycophilousa (terme grec : du doux baiser) ou Vierge de tendresse est une représentation de la Vierge à l’Enfant mettant l’accent sur la tendresse de la mère à l’égard de son enfant. La Vierge tient son enfant et lui donne ou s’apprête à lui donner un baiser sur la joue.

 

(***) Federico Carlini, Ambrogio Lorenzetti (cat. d’exp.), Silvana Editoriale, 2017.

 

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