Le totalitarisme écologiste contre les peuples du monde

13/10/2023

Patrick AULNAS

L’idéologie écologiste se heurte de plus en plus aux réalités politiques. Le thème de propagande bien connu (choisir entre la fin du mois et la fin du monde) ne suffit plus à expliquer les réticences et les difficultés. Autrement dit, le choix entre le contrôle politique du progrès scientifique et technique et l’extinction de l’espèce humaine se révèle désormais pour ce qu’il est : un piège idéologique qui ne trompe plus que les adeptes de la doxa écologiste.

 

La fin du monde ou le totalitarisme ?

Première thématique : la coercition politique est nécessaire pour éviter la fin du monde. Interdiction de recherche des énergies fossiles, action sur les coûts par la fiscalité (taxe dite « carbone » par exemple), interdiction future de fabriquer des voitures à moteur thermique, interdiction de louer des habitations dites « passoires thermiques », etc. La liste des mesures coercitives est longue et promet de s’allonger encore.

La moindre proposition d’assouplissement de ces contraintes normatives suscite des réactions vives parmi les adeptes de l’idéologie écologiste. Un seul exemple récent. Bruno le Maire, ministre français de l’Économie, ose affirmer qu’il faudra retarder l’interdiction d’installer des chaudières à gaz dans les bâtiment neufs. Il s’ensuit une levée de boucliers à gauche, et même dans la majorité. Reformulation immédiate et plus consensuelle par le ministre concerné. La tentative très réaliste du ministre s’est donc heurtée au mur de l’idéologie politique. Mille exemples analogues pourraient être cités.

Le risque totalitaire apparaît. Les mouvements écologistes les plus radicaux deviennent violents et il n’est pas exclu qu’ils passent au terrorisme à l’avenir. Mais il y a plus. La coercition étatique en vue de la transition écologiste est désormais niée par certains, selon le principe marxiste de la dictature du prolétariat. La dictature de la classe élue par l’Histoire n’est pas considérée comme une dictature véritable par les marxistes. Elle représente une phase transitoire permettant de faire émerger la société future à laquelle il est impossible de s’opposer puisqu’elle résulte du déterminisme historique.

Il en va de même avec l’idéologie écologiste. Ne discutons pas ici de la scientificité des rapports du GIEC, qui reposent incontestablement sur de multiples observations scientifiques. Mais l’idéologie se réclame insidieusement de la science pour contraindre, laissant entendre à un large public que l’avenir est déterminé scientifiquement. Le projet normatif écologiste est présenté comme scientifique, ce qui fait sa force dans l’opinion, alors qu’il est purement politique.

L’idéologie écologiste obéit ainsi à la même logique déterministe que le marxisme. Fondée sur une vérité considérée comme scientifique par ses affidés (rapports du GIEC en particulier), cette idéologie ne peut admettre d’opposants (qualifiés climatosceptiques). Tous ceux qui n’adhèrent pas n’ont rien compris. L’histoire future de l’humanité étant définie scientifiquement par l’idéologie écologiste, la contrainte étatique n’est plus une contrainte mais une nécessité vitale. S’y opposer ne peut être que délictueux. Le droit doit donc s’ajuster au plus vite à l’idéologie. Le risque totalitaire resurgit.

 

La transition autoritaire contre les peuples du monde entier

Cette rigidité idéologique se heurte désormais aux réalités. L’ambition d’électrification complète du parc automobile et des modes de chauffage ne pourra voir le jour dans les délais imposés par les instances étatiques. La transformation complète de la production industrielle en vue de réduire drastiquement la consommation de matières premières et d’énergies fossiles est hors de portée à échéance prévisible.

Il est en effet impossible de transformer rapidement et radicalement un système de production-consommation qui a sorti une grande partie de l’humanité de la précarité. Il faudra beaucoup de temps, d’intelligence et d’inventivité pour y parvenir. Sinon, le retour à la précarité ancestrale entraînera des bouleversements politiques tels que l’idée même de transition écologique n’existera plus. La croissance peut être forte si elle est immatérielle et donc peu consommatrice de matières premières et d’énergie, mais cette évolution nécessite une libération créative et non une normativité coercitive.

Les peuples d’Occident, principaux bénéficiaires du développement économique, commencent à rechigner. Ils comprennent que la transition « solidaire » a toutes les chances de ne pas l’être et que la future « sobriété » risque de devenir une austérité imposée et sanctionnée. Des pénuries sectorielles apparaissent déjà à la suite de la pandémie de covid-19. Il est difficile de leur attribuer des causes précises. Ce ne sont probablement que les premières alertes.

Pour les peuples du Sud global, un seul mot suffit : ils n’aspirent qu’à atteindre le niveau de vie occidental tout en détestant parfois l’Occident pour son arrogance de vainqueur.

 

La faute de l’Occident : le développement économique

Les idéologues de l’écologie considèrent que l’Occident a commis une faute grave en exploitant à outrance les richesses naturelles depuis deux siècles. In petto, ils pensent qu’un acte de contrition est nécessaire. Le pape François lui-même est sur cette ligne. La coercition étatique dans des pays comme le France n’a aucune autre justification que cette culpabilité. Il faut désormais être exemplaire après deux siècles de gabegie. Montrons-le à la planète entière !

Les réalités importent donc peu aux adeptes de l’idéologie écologiste. Les projets vertueux des instances politiques occidentales n’auront qu’un impact modeste. La Chine produit à elle seule le tiers des émissions de CO2 de la planète pour une population d’un peu plus d’un sixième de la population mondiale. Les émissions de l’Union européenne représentent 10% du total mondial et celles de la France 1%. La France est d’ores et déjà un excellent élève du fait de son parc de centrales nucléaires et de son hydroélectricité, choix historiques de la fin du 20e siècle. Les contraintes imposées aux français à marche forcée n’auront qu’une incidence planétaire homéopathique, pour ne pas dire inexistante.

 

Anticapitalisme et antitechnicisme

Au-delà de la culpabilité occidentale (Le sanglot de l’homme blanc de Pascal Bruckner), les mouvements écologistes sont imprégnés d’anticapitalisme et d’antitechnicisme. L’anticapitalisme est évidemment un héritage marxiste. Les travailleurs exploités doivent donc l’abattre. Mais le capitalisme est aussi jugé responsable de l’évolution climatique et de la dégradation de l’environnement naturel. Jean Jouzel, climatologue, ancien vice-président du GIEC, a déclaré récemment que « le capitalisme est incompatible avec la lutte contre le réchauffement climatique ». Le modèle économique souhaité par les écologistes est un étatisme totalement opposé à l’initiative individuelle. Les initiatives doivent être collectives et validées politiquement, conformément au principe de base du socialisme.

L’autre aspect de l’idéologie écologiste, l’antitechnicisme, trouve sa source dans les essais des pères de l’écologisme. Citons, pour la France, Jacques Ellul (1912-1994), qui voyait la technique s’autonomiser progressivement et interdire toute approche non technicienne. La technique risque à terme de dominer le politique. L’opposition écologiste à l’énergie nucléaire trouve sa source dans cette théorie. L’énergie nucléaire suppose un haut niveau de compétence tant dans la mise en œuvre que dans les contrôles (Autorité de sûreté nucléaire en France, plus de 500 personnes hautement qualifiées). La gestion et le contrôle des centrales nucléaires échappent largement au politique. Il n’en va pas de même pour les éoliennes et panneaux solaires, technologies beaucoup plus simples que les partis politiques peuvent appréhender. L’opposition au nucléaire des écologistes cache donc une lutte entre l’ingénieur et le militant politique.

Pour les idéologues de l’écologie, tout est collectif, tout est politique. La science et la technique ne doivent pas pouvoir prendre leur envol sans aval idéologique. Nous revenons ainsi à l’approche qui prévalait avant le siècle des Lumières. Les gouvernants, représentants de Dieu, ne pouvaient admettre la rationalité scientifique. Pour les écologistes d’aujourd’hui, les gouvernants, représentants de Gaïa, le système Terre, ne peuvent tolérer que l’on offense la déesse.

Commentaires

  • Cassandre
    • 1. Cassandre Le 14/10/2023
    Bravo ! Tout est dit en quelques lignes.

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