Il faut choisir : pour ou contre les Gilets jaunes

22/01/2019

Patrick AULNAS

Lorsqu’un mouvement social dure longtemps, il évolue nécessairement. Et lorsqu’il n’est pas canalisé par des organisations politiques ou syndicales, il représente rapidement une opportunité pour les extrémistes. Le mouvement des Gilets jaunes (GJ) en est sans doute à ce stade. Les femmes et les hommes de la liberté doivent alors choisir leur camp.

 

Emmanuel Macron et les GJ

La haine que suscite Emmanuel Macron chez les GJ a surpris le pouvoir mais aussi beaucoup d’observateurs. Les GJ ne se recrutent pas parmi les électeurs de Macron au premier tour de la présidentielle. Mais la plupart d’entre eux n’ont pas non plus voté Macron au second tour. Ils se sont abstenus, ont voté blanc ou nul ou ont accordé leur suffrage à Marine Le Pen.

Les GJ aiment à rappeler que le Président de la République est l’élu de 24% des suffrages exprimés et de 18% des inscrits au premier tour. Le second tour, à leurs yeux, ne compte pas. Ce raisonnement absurde (au 2e tour, on élimine sans adhérer nécessairement et il n’y a pas d’autres solutions) explique largement le sentiment d’illégitimité et la détestation d’Emmanuel Macron.

Mais le profil de premier de la classe du Président irrite au plus haut point ces opposants. Sa maîtrise intellectuelle des sujets, liée à une capacité de synthèse assez rare, séduit particulièrement ses sympathisants. Mais elle irrite les GJ, qui ne perçoivent pas le niveau de la performance du Président face à des contradicteurs ou à des centaines de maires réunis dans une salle. Ces tentatives de rationalisation ne les concernent pas. Les GJ sont immergés dans la passion politique.

Valéry Giscard d’Estaing fut un autre Président très brillant, capable de présenter avec une clarté remarquable les sujets les plus complexes. Lui aussi fut largement incompris des milieux populaires. Il représentait pour eux la France d’en-haut. Les qualités pédagogiques ne sont pas appréciées de ce type d’opposants, qui voient de la condescendance dans l’effort explicatif.

 

Violence brune ou violence rouge ?

Outre la passion politique haineuse, c’est la violence du mouvement qui semble désormais prédominer. Violence physique plus ou moins forte lors des manifestations de rue, agressions contre des élus ou des journalistes, violence verbale exécrable sur les réseaux sociaux. Mais cette violence est aussi dirigée contre les institutions. Les revendications de démocratie directe (référendum d’initiative citoyenne sous différentes formes) constituent en réalité une remise en cause de la démocratie représentative. Or, la démocratie ne peut être que représentative à 99% dans nos sociétés complexes. Le référendum est nécessairement la rare exception.

En invoquant le nom d’Étienne Chouard, propagandiste sans nuance de la démocratie directe, certains politiciens comme François Ruffin ont commis une imprudence majeure. On ne sait en effet si Chouard se situe à l’extrême-droite ou à l’extrême-gauche, mais une chose est certaine : il est animé par une haine farouche de la démocratie représentative et d’une manière générale de toute la réalité économique et politique contemporaine. Anarchiste, gauchiste, fasciste ? Personne n’en sait rien, mais tout est possible avec Chouard.

Le mouvement de GJ prend ainsi des couleurs connues. Son caractère brun-rouge transparaît désormais derrière le jaune des gilets.

 

Des méthodes de nervis

Il ne faut donc pas confondre les GJ de novembre et début décembre 2018, qui étaient quelques centaines de milliers, et les GJ de 2019, réduits à quelques dizaines de milliers de personnes tout au plus. Seuls les plus déterminés poursuivent leur action, mais quelle est aujourd’hui l’influence des militants extrémistes agissant incognito ? Quel est le rôle sur les réseaux sociaux d’officines politiques cherchant à abattre la République ? Et comme tout est manipulable sur internet, quel appui les puissances étrangères les plus antidémocratiques accordent-elles aux GJ ?

De toute évidence, les braves français en colère contre la politique du gouvernement ont cédé la place à des individus habités par la violence antidémocratique. La couleur brune (RN et extrême-droite) semble dominer de plus en plus, mais la couleur rouge reste présente (LFI et extrême-gauche). Si l’on en juge par les propos antisémites, les quenelles de certains GJ, les insultes ordurières envers le couple présidentiel et les intimidations multiples, par exemple les menaces à l’encontre de la famille de Brigitte Macron, nous avons vraiment changé de registre. Ce sont bien là des méthodes de nervis de bas-étage, tout à fait conformes aux habitudes des fascistes et des staliniens d’antan.

 

Il faut choisir et le dire ou l’écrire

Il convient donc désormais d’annoncer clairement sa position. Le mouvement des GJ devient dangereux pour la pérennité de notre démocratie. La démocratie ne peut être la mise en demeure en 2019 d’un Président élu en 2017. La démocratie ne peut être le refus de dialoguer. La démocratie ne peut être l’injonction d’annuler des réformes qui sont la mise en œuvre d’un programme accepté démocratiquement.

Il faut choisir : le débat raisonnable et l’inéluctable compromis démocratique ou la violence des passions habilement entretenue par les extrémistes.

 

Commentaires

  • Woz
    • 1. Woz Le 02/02/2019
    J'approuve totalement vos propos: la poursuite du mouvement des Gilets Jaunes montre qu'il s'agit maintenant d'une tentative de désagrégation de la démocratie représentative et de nos institutions et aussi d'un refus de la rationalité au profit des affects et des passions. Ceci est inquiétant.

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