La cagnotte fiscale et les irresponsables

15/03/2018

Patrick AULNAS

Le grotesque subterfuge de la cagnotte fiscale vient à nouveau d’être utilisé par des irresponsables, dont le rapporteur général du budget Joël Giraud. La croissance réelle constatée en 2017 étant de 2% alors que les prévisions de recettes avaient été établies sur la base d’une croissance de 1,7%, il existe un surplus de recettes fiscales de 4,3 milliards d’€ baptisé cagnotte par quelques politiciens avides de dépenses publiques nouvelles.

Il n’y a jamais de cagnotte dans les finances publiques puisqu’il s’agit d’argent prélevé par la violence légale sur les citoyens. Si un surplus de recettes apparaît, il appartient aux citoyens et non aux politiciens. Si ceux-ci ont endetté abusivement la puissance publique, c'est-à-dire nous tous, il convient de diminuer la dette.

Mais ces principes élémentaires de bonnes gestion ne conviennent pas à certains. Voici pourquoi.

 

La croissance est une opportunité de dépenses pour les politiciens

Depuis des décennies, une croissance économique plutôt modeste a presque toujours existé, les années de récession étant rares. Mais la croissance est perçue comme une opportunité de dépenses publiques supplémentaires par de nombreux politiciens, parfaitement relayés par les médias. Les journalistes ne sont pas aveugles. Ils saisissent parfaitement la grossière démagogie motivant les propositions de dépenses nouvelles.

Mais, comme l’humus pour les végétaux, la polémique est fertile pour faire croître le lectorat ou les audiences. Alors, une polémique sur une prétendue cagnotte fiscale est bienvenue. Évidemment, la cagnotte est une vue de l’esprit ne reposant sur aucune réalité.

 

Bonne gestion publique mais aussi impératif moral

D’où vient la prétendue cagnotte ? C’est très simple. La croissance économique induit une augmentation des assiettes fiscales (bénéfices, salaires, chiffres d’affaires en particulier). Il en résulte donc des rentrées fiscales supérieures aux prévisions budgétaires si celles-ci ont été établies sur la base d’une croissance inférieure à la réalité observée. Mais cette bonne surprise devrait conduire à des politiques différenciées selon la situation du pays.

Lorsque l’endettement public frôle les 100% du PIB, comme actuellement en France, la priorité des priorités est le désendettement. Il s’agit d’abord d’une mesure de bonne gestion qui permet d’alléger le fardeau des intérêts qui deviendra écrasant lorsque les taux remonteront. Mais il s’agit aussi d’un impérieux devoir moral car la dette est le legs d’une génération d’irresponsables (la mienne) à ses enfants et petits-enfants.

 

Les richesses appartiennent à ceux qui les créent

Si la situation des finances publiques est saine et que l’endettement est raisonnable (rappelons qu’il était d’environ 20% du PIB en 1980, avant la plongée socialiste de 1981-95, dont nous ne sommes jamais sortis), il faut utiliser la bonne surprise de la croissance pour baisser le niveau des prélèvements et non augmenter les dépenses. La raison en est évidente : la croissance résulte du travail des individus et des entreprises et ses résultats devraient donc leur être ristournés en baissant les impôts et taxes.

En utilisant le concept très vulgarisateur (pour ne pas dire vulgaire) de « cagnotte », on laisse entendre que le bon résultat du travail dans une société doit permettre d’augmenter les dépenses publiques.

 

L’admirable sens pédagogique de la gauche

Un certain keynésianisme bas de gamme, très usité par certains polémistes, accompagne souvent les péroraisons sur la cagnotte. Il consiste à considérer qu’une redistribution selon des critères politiques suscite à nouveau de la croissance. Alors pourquoi s’en priver ? Il suffit en effet, comme chacun sait, d’utiliser un excédent de rentrées fiscales dans des dépenses nouvelles pour amorcer un cycle vertueux de croissance éternelle.

Il est vrai que les politiciens de gauche ont toujours fait preuve d’un sens pédagogique admirable sur le sujet. En 2000, Lionel Jospin, alors Premier ministre, dispose de ressources fiscales excédentaires de 50 milliards de francs, soit 7,6 milliards d’euros. Il utilise cette ressource pour baisser la TVA, la taxe d’habitation, le bas du barème de l’impôt sur le revenu et pour financer des dépenses nouvelles en direction de l’hôpital public et des enseignants. Commentaire de Lionel Jospin sur TF1 : « Je préfère les fièvres de croissance aux maladies de la dépression. » Sans commentaire.

En vérité, l’élection présidentielle de 2002 se profilait à l’horizon et il fallait rassembler ses troupes avec des cadeaux de bienvenue. Mais la dette de la France, héritée de la désastreuse gestion socialiste, était déjà à cette époque de 58,6% du PIB. Rien ne fut fait pour tenter de la réduire.

 

A nous la bonne soupe

La raison profonde des palabres autour d’une prétendue cagnotte est purement politique. Il s’agit pour certains politiciens, pas toujours de gauche, de s’arroger de plus en plus de pouvoir de décision économique sur la société. La méthode est tout à fait transparente. Dès qu’il y a croissance, les idées politiciennes volent bas : « à nous la bonne soupe, à nous les bénéfices de la redistribution de l’argent des autres ».

 

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