Sens de l'Histoire et politique

29/05/2013

La dernière manifestation de masse contre le « mariage pour tous » a eu lieu le dimanche 26 mars à Paris. On pouvait y voir défiler des élus de droite, écharpe tricolore en bandoulière, passablement ridicules, car à nouveau solidaires d'un combat d'arrière-garde à contre-courant de l'histoire. Leur présence en tête du cortège ne trompait personne : ils suivaient le mouvement.
Ce comportement archaïque dans le domaine sociétal est monnaie courante à droite. La loi Neuwith de 1967, autorisant la contraception, a été l'aboutissement de longues batailles contre des parlementaires hostiles, presque tous hommes, momifiés dans des certitudes appartenant au passé. Pour faire adopter la loi sur l'IVG (interruption volontaire de grossesse) en 1975, Simone Veil a dû subir les grossières insultes de mammifères mâles qui n'avaient d'humain que le nom. Le PACS (pacte civil de solidarité) n'a été voté en 1999, sur proposition du gouvernement Jospin, qu'après une opposition acharnée de la droite parlementaire. La contraception, l'IVG, le PACS font aujourd'hui partie de la vie courante des français et nul ne songerait à abroger les lois qui les ont institués. Il en ira évidemment de même dans quelques années pour le mariage homosexuel. Il suffit de sentir le souffle du vent de l'Histoire pour en être persuadé. La droite se trompe donc de façon récurrente dans ce domaine, et ses leaders, à part quelques rares imbéciles, en sont parfaitement conscients.
Mais voilà ! Il faut tenir compte de l'électorat, des prochaines élections, du sentiment du petit bourgeois catholique de Trifouillis-la-Campagne. Ledit petit bourgeois pense inéluctablement que l'avenir doit être à l'image du passé, de son passé à lui. S'il a été élevé dans une famille unie avec « un papa, une maman et des enfants » (slogan idiot des manifestants), fréquentant l'église le dimanche et s'autorisant sans doute des pâtisseries le même jour, il convient évidemment que l'avenir du monde soit calqué sur ce modèle. Toute personne sensée, sans culture historique particulière, a l'intuition qu'il n'en sera rien. Le destin des hommes se construit chaque jour, et chaque jour que vit l'humanité est imperceptiblement différent du précédent. La famille n'existait pas dans les grottes paléolithiques. Pourquoi existerait-elle encore dans quelques milliers d'années ?
Si de telles évidences ne sont pas partagées par bon nombre d'électeurs de droite, c'est uniquement à un enfermement idéologique qu'ils le doivent. Le poids des religions est encore écrasant. Un dogme religieux est un schéma simpliste de notre univers, à la portée de tous, permettant de croire à une certaine stabilité sous les auspices d'une divinité quelconque. Lorsque l'évolution de la société heurte de front le dogme, la résistance au changement relève du réflexe. La peur de perdre le cadre idéologique sécurisant conduit, avec des justifications de circonstance (voir les slogans), à s'arcbouter sur le passé.
Les leaders des partis politiques privilégiant toujours le court terme électoraliste et délaissant les réflexions de fond, il est donc nécessaire de se positionner, par opportunisme politique, contre le sens de l'Histoire.

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