Manque d'autorité ?

15/05/2013

Les médias cultivent savamment depuis quelques mois le thème de l'autorité, du leadership du Président de la République et du Premier Ministre. Pour affirmer qu'ils en manquent. Il semble que pour certains journalistes, et peut-être aussi pour la partie la plus archaïque de l'électorat, il faille élever la voix et rouler des épaules pour diriger. Un chef doit avoir l'air d'un chef. N'a-t-on pas dit et écrit que l'intervention au Mali transformait François Hollande en « chef de guerre ». Une telle approche doit être interprétée pour ce qu'elle est : de la communication. Les journalistes étant des professionnels de la communication, ils confondent fréquemment la paille des mots et le grain des choses.
Le grain, c'est la décision et sa préparation. Pour décider d'intervenir militairement au Mali dans un Etat démocratique moderne, il faut bien analyser les données diplomatiques, apprécier la puissance militaire de l'adversaire et anticiper les conséquences potentielles de l'intervention. Les réponses à ces questions détermineront la décision : intervention militaire ou non. Il s'agit donc d'utiliser ses compétences pour traiter au mieux l'information disponible. Le maître-mot est rationalité. La difficulté réside dans la capacité de synthèse de l'ensemble des données du problème. Ce raisonnement peut être transposé dans n'importe quel domaine de l'action politique au plus haut niveau. Nul doute que François Hollande et Jean-Marc Ayrault possèdent à cet égard les qualités requises pour décider. Ils ont donc la fameuse autorité.
La paille, c'est la manière de présenter au grand public les décisions prises. Il est impossible d'entrer dans le détail des dossiers d'un point du vue diplomatique, militaire, économique, financier. Il s'agit donc de vulgarisation. Pour vulgariser, il est en général nécessaire d'introduire de l'émotion et de l'éthique. Ainsi, la France n'intervient pas au Mali parce que la raison l'impose mais parce que la justice l'exige. Une telle optique vulgarisatrice peut facilement conduire à transformer un décideur politique en chef de guerre. L'image renvoie à Napoléon, à Alexandre et à la dimension épique des conflits armés. Mais il ne s'agit que d'une image très déformée de la réalité, destinée à faire rêver la population.
Que faut-il en conclure ? Que l'autorité d'un dirigeant politique dans une démocratie est sa capacité à prendre des décisions pertinentes, capacité qui repose sur sa maîtrise des problèmes à traiter. On a de l'autorité parce que l'on est capable de synthétiser un ensemble complexe d'informations permettant d'élaborer une décision. Il est clair, à cet égard, que certains ministres manquent d'autorité parce que leur capacité de synthèse est insuffisante : ils maîtrisent mal les sujets qu'ils traitent et se réfugient dans l'électoralisme tapageur pour sauver la face. L'exemple-type est fourni par Arnaud Montebourg. Mais reprocher au Président de la République et au Premier Ministre de manquer d'autorité, c'est confondre l'image et la réalité. Le charisme, capacité de subjuguer les foules par des procédés théâtraux, a beaucoup moins d'importance aujourd'hui. On pourrait presque affirmer que la presse confond réel et représentation.

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