Hollande, sa majorité et les institutions

15/07/2013   

La politique économique de François Hollande est illisible. Des mesures contradictoires se succèdent au gré des circonstances et des opportunités politiques. En 2012, retour à la retraite à 60 ans pour certains salariés puis en 2013, réforme générale des retraites avec probablement un allongement de la durée de cotisation. En 2012, durcissement de la fiscalité des plus-values immobilières pour les particuliers puis, en 2013, abattement sur ces plus-values du fait de l'inertie du marché immobilier. On pourrait multiplier les exemples. Chez Hollande, le pragmatisme semble toujours succéder au dogmatisme. Il est bien conscient de la réalité économique et financière du pays et de la dangerosité de la situation, mais il doit toujours donner des gages à l'aile gauche du parti socialiste. Il n'ignore rien de l'archaïsme dogmatique de certains nouveaux députés socialistes qui proviennent de la fonction publique et du milieu associatif mais qui ignorent tout de la réalité de l'entreprise. Combien de ces députés seraient capables de comprendre un bilan ou un compte de résultat ? Que savent-ils des stratégies des grands groupes ? Ont-ils conscience des difficultés que rencontrent les dirigeants de PME pour dégager un excédent brut d'exploitation en période de récession ?
La fragilité de la majorité socialiste provient, non seulement de son caractère composite, mais aussi de ses caractéristiques culturelles. Comme celle de Lionel Jospin en son temps, c'est une majorité « plurielle ». Mais contrairement à celle de Jospin, elle se délite rapidement. Le Parti de gauche est déjà dans l'opposition. Les Verts ne soutiennent plus les projets gouvernementaux sur certains sujets. L'aile gauche du Parti socialiste émet plus que des réserves. Ainsi, Marie-Noëlle Lienemann se répand dans les médias pour critiquer vivement une austérité qui n'a pas commencé. D'un point de vue culturel, une bonne partie des militants socialistes ont une vision de la politique qui rime avec rupture. Le compromis est vite assimilé à de la faiblesse et un pragmatisme trop affiché à une trahison. La compétitivité, la flexibilité, la rentabilité sont des gros mots dont se délectent les capitalistes et leurs affidés. L'origine de cette culture de combat provient du mythe révolutionnaire. Les références historiques et idéologiques du socialisme comprennent la révolution française de 1789, les « révolutions » du 19e siècle (1830,1848, Commune de Paris de 1871) puis le marxisme, la lutte des classes et la propriété collective des moyens de production. Si le programme officiel du parti socialiste ne fait plus allusion à ces derniers éléments, ils restent un idéal chez beaucoup de militants.
La politique qui devra être menée dans les années qui viennent est en contradiction frontale avec ces rêvasseries révolutionnaires. La France devra s'adapter au monde tel qu'il est car elle n'a pas un poids suffisant pour infléchir le destin de la planète. Il faudra s'intégrer au processus de mondialisation en se montrant pragmatique et performant ; sinon, nous paierons très cher nos rêves archaïsants. François Hollande risque donc de voir s'effriter peu à peu sa majorité. Fort heureusement, les institutions de la Ve République lui fournissent les moyens d'agir efficacement. La menace de la dissolution et de la perte de leur siège de député peut calmer les ardeurs de beaucoup de révolutionnaires en paroles. Si nécessaire, une dissolution peut amener un changement de majorité parlementaire et une cohabitation avec un gouvernement de droite. Mais il faudrait pour cela que François Hollande commence à hausser le ton et définisse clairement les grands axes de sa politique économique. Il n'a pas été élu Président pour louvoyer mais pour agir.

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